dimanche 28 juillet 2013

J-359 : Vastarel®, l'homéopathie et "Hannah Arendt".

Le 23 Juillet, Marisol Touraine, ministre de la santé, était en visite dans une maison de retraite, l'occasion de rappeler aux occupants l'importance d'une bonne hydratation en cette période de forte chaleur (1).
Outre la médiocrité affligeante de ce déplacement et sa mise en scène ridicule, ce qui frappe, c'est l'abandon de toutes formes de responsabilités chez nos élites, en même temps que leur inanité.
Le peuple, au travers une lutte acharnée, aura permis la construction d'un système égalitaire :  l'Assurance maladie. Mais l'universalité, ainsi que l'essence même de ce système de soins sont remis en question, la faute à une classe politique, qui n'a de cesse, que la conservation du pouvoir au travers les différentes échéances électorales.

Fatalement, et face à un État et des institutions moralement en ruine, les individualités aux appétits aiguisés, profitant dès lors, d'un capitalisme in fine dérégulé, oeuvrent vers une logique de maximisation des profits et une aversion pour les pertes, au mépris de toute vie humaine.
A ce jeu là, Jaques Servier - présumé innocent - aura tout gagné. En bénéficiant d'une législation laxiste, concernant l'octroi des AMM, et s'appuyant à un système de pharmacovigilance défaillant, il aura écoulé son médiator® durant des années. Une fois le scandale révélé, l'instruction, toujours en cours, nous offre un spectacle effarant.
D'un cynisme absolu, le groupe Servier aura proposé une indemnisation aux victimes, conditionnée par l'abandon de toutes poursuites judiciaires. Suscitant un véritable tollé, le groupe sera obligé un peu plus tard, de revenir en arrière (2).

- "Vendre des armes, c'est comme vendre des aspirateurs, on passe des coups de fil, on fait des kilomètres, on prend des commandes..." (3)

Dans Lord of War, Nicolas Cage décrit son entreprise, comme une entreprise banale. Un marché trivial qui serait fatalement occupé par un autre, si il venait lui-même à l'abandonner.
Les "seigneurs de guerre" ne travaillent jamais seul. Ce sont les généraux, les sous-fifres, qui se mouillent, occupent le terrain, terrifient les concurrents, cherchent des clients. Mais dans ce casino géant, on ne gagne pas à tous les coups, et les seigneurs tombent, parfois. Dans le dossier du médiator, ce sont cinq nouvelles mises en examen, peut-on lire dans l'article de Simon Piel, paru sur le monde.fr ; qui nous rappellent, l'existence d'un système de santé gangrené par les conflits d'intérêts.
Parmi les prévenus, quatre médecins qui étaient membres de la commission d'autorisation de mise sur le marché (AMM), mis en examens entre autre, pour  : "participation illégale d'un fonctionnaire dans une entreprise précédemment contrôlée", "prise illégale d'intérêt", "corruption", "complicité de tromperie" et "complicité d'obtention indue d'autorisation". Rien que ça (4).

Ces quelques coups d'éclats, d'une justice isolée et manquant de moyens, ne suffiront pas à tuer l'Hydre, dont les multiples têtes nous rappellent qu'une telle entité se doit d'être encadrée. Mais nous se sommes pas en pleine Grèce antique et la ministre de la santé n'a pas le courage d'un Héraclès. L'espoir repose donc sur les individualités, forcement.

Jeudi matin, une vieille dame me présente son ordonnance. C'est plus fort que moi, je me sens obligé - même en présence du pharmacien titulaire - de prévenir cette patiente de longue date, que la trimétazidine (vastarel®) - aussi produit par Servier- qu'on lui a prescrit et qu'elle s'apprête à prendre, expose à de nombreux effets secondaires, et que sa balance bénéfice-risque défavorable imposerait l'abandon de son utilisation (5). Si c'était le seul médicament... 
Continuant l'analyse de son ordonnance, et ne pouvant décemment me taire, c'est vraiment plus fort que moi, je lui expose les risques attachés à la prise de ranélate de strontium (protélos®), qu'elle prend pour son ostéoporose, tout comme les risques afférents à la prise d'etifoxine (Strésam®), supposé calmer ses angoisses.

Si omettre des informations ne semble par préjudiciable lors de la prise de granulés homéopathiques, il en est autrement des médicaments allopathiques. Les pharmaciens français, au mépris de la loi du 4 mars 2002 relative à l'information et au droits des patients, se contentent bien souvent, de simplement vérifier l'absence de contre-indications, les posologies, ainsi que le respect des indications des médicaments prescrits, omettant l'exposé des risques liés à l'utilisation de chaque molécule. 
Le pharmacien ne serait pas alarmiste, ni ne manquerait à son devoir de confraternité en analysant réellement l'ordonnance. Il ne ferait que son travail.

Le patient a le droit de savoir que le vastarel prescrit, expose a des symptômes parkinsoniens entre autres, pour une efficacité modeste, au pire inexistante (5). Le patient a le droit de savoir que la prise de ranélate de strontium, expose à un syndrome d'hypersensibilité multiorganique d'origine médicamenteuse, se manifestant par une éruption cutanée généralisée, une fièvre élevée, et une atteinte viscérale (hépatique, rénale, et pulmonaire), avec une mortalité de 10% (6).
Le patient a le droit de savoir, que les granulés homéopathiques qui lui ont été prescrits au vu de ses symptômes, ne contiennent que du sucre, qu'ils sont fabriqués après un processus de dilutions multiples, ne possèdent aucun effet pharmacologique, et qu'il ne pourra en conséquence, s'attendre à rien d'autre - au delà du goût sucré en bouche - qu'à un effet placebo, bénéfique à hauteur de 30%.

En occultant ces informations essentielles nécessaires à un choix éclairé, et en résumant l'acte de délivrance à un simple processus légal de vérification, en conformité avec les désirs du prescripteur, en vu d'un remboursement par l'assurance maladie, le pharmacien devient un "dealer". Si on prend la définition première du dealer, en tant que personne donnant une drogue, de la main à la main, en échange d'une somme d'argent, oubliant les risques potentiels encourus par l'usager.

Je ne peux me résoudre à une telle situation, scandaleuse, inadmissible et révoltante. Cette vision verticale et paternaliste de la médecine, où "le père dit, l'enfant exécute", m'écoeure et déshonore la profession de pharmacien,  fondamentalement bonne et nécessaire, mais qui semble chercher son équilibre.
La rémunération du pharmacien - étant le spécialiste du médicament - devrait être fondée exclusivement sur son travail d'analyse et ses capacités d'expertise, allant jusqu'au refus de délivrance s'il le fallait, attendu la protection nécessaire et absolue du patient. Cette disposition existe d'ailleurs dans le code de santé publique, mais n'est jamais utilisée en pratique.
Vouloir rester à un système ancré sur une rémunération basée sur la marge est une preuve de lâcheté, au pire d'incompétence. Ni plus, ni moins. Ceux, qui diront le contraire, n'auront pas le courage d'avouer autre chose, si ce n'est l'impérieuse nécessité de rembourser le prêt attaché à leur fonds de commerce.

Alors fuyons, fuyons à défaut de pouvoir reformer un État quasi démissionnaire, abandonnant le sort de ses citoyens à une industrie pharmaceutique immorale et à des agents économiques motivés par leurs seuls intérêts personnels. Hanah Arendt, a introduit le concept de banalité du mal. Inspirons-nous de sa brillante analyse ici. Les individus, lorsqu'ils ne font que suivre les règles, suivre ce qui leur est permis, autorisé, indiqué, sans penser au destin possible des autres sujets, perdent en quelque sorte de leur humanité. Ce qu'on appellera ici, "la banalité du bien". 

Délivrer un médicament, prescrire un médicament, ce sont là des actes important, des actes responsables. Tous les pharmaciens et tous les médecins le savent. Les professionnels de santé accompagnent ainsi souvent les prescriptions et les délivrances de conseils. Protégez-vous du soleil, prenez ce médicament le matin, celui-là plutôt aux repas, etc...

Mais la responsabilité ne s'arrête pas à ces conseils. Un médicament n'est pas nécessairement bon, il peut-être mauvais. Ne banalisons pas son bien fondé.

Pour le médiator, c'est l'AMM qui a conditionné les prescriptions massives, et donc les délivrances automatiques dans toutes les pharmacies. Personne n'était responsable, personne n'était au courant, soi-disant, alors même que la revue prescrire  émettait des doutes justifiés et étayés, conseillant sa non utilisation.

"Pourvoir", n'est pas forcément "devoir". Évitons une autre affaire de ce type. A notre échelle, formons-nous, les universités faisant l'impasse sur ces questions essentielles, liées à l'indépendance de l'information médicale. Un nouveau médicament est-il forcement meilleur qu'un vieux ? Ce traitement est-il forcement adapté ? Le patient est-il au courant des risques qu'il prend ? Sommes-nous tout à fait honnête vis à vis de lui ? Il existe des revues indépendantes, il suffit de les lire. Car, on ne pourra pas éternellement se cacher derrière cet argument : 

- "I did not know..." (7).




Bibliographie : 



1.Marisol touraine en déplacement. : 

2. Mediator : Servier ne conditionne plus l'indemnisation à l'abandon des poursuites. Les échos. N°2084 :28

3. Bande annonce, Lord of war, 2005
4.Simon Piel, Cinq nouvelles mises en examen dans le dossier du Mediator. Lemonde.fr, 2013.

5. "Trimétazidine et restrictions d'utilisation : insuffisances des autorités de santé européennes" Revue Prescrire 2013 ; 33 (357) : 507.

6. "Stontium et ostéoporose. A écarter". Revue Prescrire 2013 ; 33 (354) : 267.

7. Retranscription de l'intérogatoire d'Eichmann par Avner Less, utilisé lors du procès de Nuremberg.





 Hannah Arendt, de M.Von Trotta, 2012

mercredi 24 juillet 2013

J-360 : Dukan, le ketchup et Matrix.

-"I have a dream that one day this nation will rise up and live out the true meaning of is creed...". Citons ici Martin Luther King et la beauté des rêves parfois réalisés (1).
La grandeur d'un homme se révèle souvent aux messages qu'il transmet, inspirant souvent les foules et les individualités en quête d'espoir et d'idéal, pour le meilleur et pour le pire, l'Histoire nous l'a suffisamment montré. 
Ainsi, l'universalisme passé et flamboyant d'un Martin Luther King, rencontre aujourd'hui, le capitalisme affligeant et navrant, d'un Pierre Dukan. 

En 2012, à peu près 7 000 000 de français étaient obèses, soit environ 15 % de la population française, sans qu'on ne se pose réellement de questions (2). Dans une société de plus en plus anxiogène, où le culte de la performance participe au sentiment d'insécurité, "l'émotionalité alimentaire" - le fait de manger sous le coup de l'émotion - semble être une des raisons à ce surpoids, notamment chez les femmes. La culture de l'instantanéité, celle du "tout, tout de suite" pousse les individus peu éclairés vers des aliments trop sucrés, trop salés.
De l'autre côté de l'échiquier, observons le mirage constant de la perfection.
Des marques comme Abercrombie et Fitch au travers leurs vêtements, promettent une forme d'exclusivité, celle d'appartenir à un idéal, celui des gens beaux (3).
Les parfums, les magazines, les publicités, la télévision, le cinéma, les sites de rencontre, tout concours à polariser le monde des dieux et celui des mortels. 

Pierre Dukan est un opportuniste. Grâce a son titre de docteur en médecine, il aura su appuyer un discours pseudo-scientifique et en faire une marque : le régime Dukan. Le bouche à oreille aura fait le reste. Il aura su bâtir un mini empire, aidé d'un marketing parfaitement maîtrisé. 
Lors de mon dernier CDD, j'ai travaillé dans une énorme pharmacie. Une "pharmacie usine" avec 5 pharmaciens, 8 préparatrices, et une myriade de produits conseils. On pouvait trouver dans les rayons, les classiques produits minceur qui ne servent à rien et les classiques produits anti-âge, qui ne servent eux aussi à rien. Plus surprenant encore, au rayon diététique, du ketchup et de la mayonnaise, véridique.

Pierre Dukan, n'est pas le seul professionnel de santé à avoir hypothéqué son diplôme pour quelques euros. Sa radiation n'est qu'un fumigène, une façon d'attirer les regards pour faire nous faire oublier l'essentiel, son empire. Quand l'homme demande sa radiation à l'ordre des médecins, c'est en réalité se retirer pour mieux utiliser "l'effet de levier".
Effet de levier qui utilise le maillage des officines, elles aussi gagnantes, pour vendre des produits estampillés de sa marque, et des librairies pour diffuser largement ses livres de recette.

Pierre Dukan est un loup solitaire, et tous les médecins ne cautionnent, ni ne prescrivent son régime, bien heureusement. Son histoire est marginale, Il est ce qu'on appelle une singularité. A l'inverse, le discours corporatiste des pharmaciens, est hypocrite, irritant et totalement démagogique. Récemment, l'ensemble des pharmaciens, au travers leurs syndicats et les associations étudiantes, se sont élevés d'un bloc contre la proposition de libéralisation de la vente des médicaments en ligne. Aucun des arguments qui ont été avancés ne tient la route. On assiste à un exercice de style, ou la posture importe plus que tout. 

Ainsi, Réda Amrani-Joutey, président de l'ANEPF dénonce "un modèle économique uniquement mercantile - en parlant de la libéralisation - au mépris de la considération de la santé et de la sécurité du patient..." (4).
En réalité, les syndicats et les associations d'étudiant n'ont aucune légitimité à parler au nom de qui que ce soit, si ce n'est celui de leurs seuls adhérents.
C'est strico sensu le maintien d'un monopole pharmaceutique, accordé exclusivement aux pharmaciens titulaires qui motive un tel discours. 

La vente - évidemment encadrée - des médicaments en ligne, ainsi qu'une éventuelle ouverture du monopole pharmaceutique aux grandes surfaces serait un bénéfice pour les consommateurs, puisque des règles évidentes de concurrence pourraient enfin s'établir. Qui plus est, une telle libéralisation permettrait d'élargir les opportunités pour de jeunes pharmaciens actuellement confrontés à un marché de l'emploi atone, historiquement aux mains des pharmaciens titulaires. Le reste n'est que posture.

Le "marketing" est le nouveau dieu de ce siècle, tout ce qui est beau et désirable devient la norme et donc un idéal à atteindre où à posséder. A l'inverse du dernier Iphone, la minceur ne peut tout simplement pas s'acheter "prêt à l'emploi". Quand le régime dukan, fruit d'un homme, à la recherche de "LA" bonne idée, rencontre les appétits financiers de certains pharmaciens prêts à tout pour gagner de l'argent, on assiste alors à une forme de faillite sociale. L'hypocrisie d'un monde politique oubliant d'éduquer la population et en même temps, le manque de réalisme d'une ministre de la santé incapable de reforme le système en profondeur, abandonnent finalement les citoyens à leurs vaines pulsions consuméristes.

On ne peut cacher l'existence d'un esprit tout à fait capitaliste chez la majorité des pharmaciens. Vendre Alli® (orlistat), vendre un collier d'ambre, vendre du somatoline® ventre plat, vendre de la L-Carnithine, vendre du ketchup, cela procède de la volonté unique de faire de l'argent. Et lorsque qu'on s'insurge au nom de l'éthique, au nom de la sécurité des patients, contre toute forme de libéralisation, on ne peut que ricaner face à telle bouffonnerie, qui n'a de sens, que la protection des privilèges.
Rappelons-nous le film the Matrix, et sa fameuse pilule rouge, la pilule de vérité (5).
Que faire, quand l'éthique et la vérité n'ont plus de visage, comment les reconnaître, la blouse blanche n'étant pas toujours intègre, pas plus d'ailleurs que la croix verte du pharmacien ?  

Pilule rouge avalée, plein de lucidité, je fais le rêve de tuer un dogme, de pouvoir enfin, trouver du paracétamol au supermarché.
Je fais ce rêve idéal où l'antre pharmaceutique sera valorisé, ce rêve où je pourrai vivre de ma pensée. Car dans ce rêve, si la pharmacie n'est qu'un symbole, coincée au fond du supermarché, entre deux rayons, c'est surtout un absolu où le droit d'accompagner, de suivre, de conseiller et d'éduquer serait rémunéré.
Allons plus loin, en affirmant que libéraliser le marché, c'est justement renforcer l'impérieuse sécurité liée au médicament. C'est re-crédibiliser une fonction en misant uniquement sur les missions d'analyses dans un petit espace sanctuarisé, tout en laissant l'économie de marché au-delà de ses portes. En projetant l'officine dans un tel endroit, on réalise l'acte essentiel d'en tirer sa substantifique moelle, en re-délimitant le champ strictement pharmaceutique, reléguant ainsi tout ce qui n'en relève pas, aux lois classiques du marché capitaliste. Le reste n'est que posture.

Enfin, Je fais même le rêve un peu fou, de travailler dans un de ces supermarchés. Car en réalité, ce n'est pas tant l'émergence d'un tel endroit qui devrait nous faire peur, mais plutôt son absence, signe de l'existence d'une caste.
Une caste qui a encore et toujours tout eu, et qui lutte bec et ongles pour conserver un statut.

Rêvons.




1. Discours de Martin Luther King, Lincoln Memorial, Washington D.C 1963
   http://www.archives.gov/press/exhibits/dream-speech.pdf

2. Enquête ObEpi-Roche 2012.

3. Abercrombie et Fitch face à ses pires cauchemars. Lemonde.fr 2013

4. Rapport de l'autorité de la concurrence : l'ANEPF s'insurge contre la proposition de libéralisation de la vente de médicaments. Réda AMRANI-JOUTEY. 16 juillet 2013


5. The matrix. Andy Wachowski et Lana Wachowski, 1999, la scène de la pilule.
http://www.youtube.com/watch?v=te6qG4yn-Ps







The matrix, des frères Wachowski, 1999

vendredi 19 juillet 2013

J-361 : l'ascenseur social, the good will hunting et les "NACOs"


Fin de semaine, l'occasion de souffler un peu. L'occasion aussi, de voir des amis, de se réjouir, enfin.
"On ne naît pas homme : on le devient", pourrait-on dire, reprenant ici Simone de Beauvoir dans son livre : le deuxième sexe (1). Quand on décide de tout quitter, de tout laisser derrière soi, on ne le fait jamais non sans raison. Des proches, des amis, la peur, un amour, il existe souvent mille explications à une sédentarité souvent de mise. C'est surtout une volonté de puissance, reprenons ici Nietzsche, qui pousse un individu à quitter sa zone de confort. Trouver mieux, se surpasser, c'est l'impérieuse nécessité biologique consistant à optimiser, envisager le champ des possibles, qui nous pousse au mouvement. Quand tout va mal, les organismes biologiques bougent, fuient, courent, dans un second et ultime élan. 

Fin de semaine, l'occasion d'un dîner entre amis, mais pas seulement. 00h54, retour par le dernier train de banlieue et la réflexion sur un ascenseur social en panne. Une fois effectué les 700 mètres qui me séparent de la gare, je me retrouvais à traverser un groupe de jeunes en bas de mon immeuble. Scooter volé, marijuana et ses odeurs caractéristiques, fort accent de banlieue, sol jonché de crachats, le cliché classique d'une intégration totalement ratée. Arrivé chez moi, et pour trouver un peu d'air, j'ouvrais les fenêtres de ma chambre en grand et fut aussitôt importuné par ce même groupe qui décidait d'aller fumer un dernier joint juste sous ma fenêtre. Le calme de cette nuit était ainsi régulièrement entrecoupé par les dérapages sournois d'un dealer en Audi A7 décapotable. Façon de communiquer, mais aussi d'exister, pour des individus heureux, ayant toujours vécu là. Le tout, accompagné d'injures, de cris, comme une sorte de reliquat d'un passé anthropologique ancestral, lorsque le verbe et le langage n'étaient qu'à leur balbutiement. Heureusement pour moi, je n'ai plus d'examens à passer. Les cris sont ainsi supportables.

Je me souviens, au collège, avoir murmuré dans mon fort intérieur que je réussirai bien à m'extirper de là, que ce n'était qu'une question de temps et de ténacité. Je me souviens aussi, de façon très claire, ma motivation sans faille, et ma croyance en une forme de justice sociale par la méritocratie. Mais la croyance va rapidement se confronter à un réalisme qui ne trompe plus.

"A l'école polytechnique, un élève sur deux a un parent prof." (2). En réalité, le jeu est largement biaisé. Je n'en veux pas à ces jeunes qui ont en quelque sorte fait preuve d'un pragmatisme compréhensible, même si l'objet de leur réussite reste méprisable. Mais quelles possibilités a-t-on quand on rentre chez soi, que nos propres parents, analphabètes, et sortant tout droit d'un village, n'alignent pas deux mots de français et qu'il n y a que 2 chambres, à partager entre 8 frères et soeurs ? Qui pourrait étudier dans de telles conditions ? Qui pourrait intégrer l'X, Centrale, ou même Sciences Po' ? 

Parlons-en de Sciences Po'. La part d'enfants d'employés et d'ouvriers a stagné : environ un étudiant sur douze alors qu'en même temps, les enfants de "cadres et professions intellectuelles supérieures" représentent 63,5 % des étudiants entrant en premier cycle (3). En même temps, on apprend dans ce même article, qu'un étudiant "y coûte 50% plus cher qu'un étudiant d'université, bien que les matières enseignée ne soient pas les plus coûteuses en équipement...". Double peine, encore une fois pour les classes populaires qui n'envoient pas toujours leurs enfants dans le supérieur, mais qui en plus, participent au financement de ces institutions via l'impôt indirect, notamment la TVA.
Dans une belle formule, Nicolas Jourdin déclare : "Sciences Po a conservé au fil du temps sa vocation d'alchimiste qui métamorphose l'arbitraire de la naissance en capacité présumée." (3).
Mais je n'allais pas finir dealer tout de même, et puis j'ai ma chambre à moi, un vrai luxe. Pas assez fort en culture générale, pas assez fort en mathématiques, j'ai tout de même eu pharma. Un coup de bol à la loterie des cerveaux. Un boulot, mais pas de quoi se payer un appart', encore moins une voiture.

Le problème est plus large, systémique. Ce n'est pas seulement  mon ascenseur qui est en panne, mais celui de toute une jeunesse, en France et en Europe. La faute a une classe dirigeante pathétique, amorale et égoïste. Une classe politique qui brille par ses échecs, sa bêtise et sa constance dans la médiocrité. Le docteur Jérôme Cahuzac a caché un compte en suisse ; dans le même temps c'est 5,6 millions de jeunes en Europe, qui sont au chômage. La génération "Y", pour l'instant sacrifiée, récupère un présent où le champ des possibles se retrouve à néant. Une jeunesse a qui on aura promis monts et merveilles, une subsistance décente qui serait acquise par les études. Mais aujourd'hui, nos beaux diplômes ne valent presque plus rien, presque.

Fin de semaine, donc. L'horloge affiche 12h30, le dernier patient-client gare une Mini Austin devant la pharmacie et rentre, me demandant du lait pour bébé. Banal, sauf que je reconnais à ce moment là un mec avec qui j'étais au collège. Un dernier de la classe, un fumeur de joint, un dealer bien connu de la cité. Ironie du sort, il venait d'emménager pas très loin de la pharmacie avec femme, et enfant. Et c'est moi, comble de la bouffonnerie, qui était en train de le servir.
Fin de l'anecdote, je serre les dents. Du dealer au politicien, en passant par le chef d'entreprise, tout est lié. Il y a les dominants et les dominés, et entre les deux, nous, qui naviguons entre ces deux mondes, à la recherche d'un équilibre salutaire.

Les grèves, le mouvement des indignés, les révolutions du printemps arabes, tout cela s'entrechoque, mais ne révolutionne pas le monde. En Europe, c'est l'absence d'utopie qui règne en maître. A 30 ans, notre génération se voit fermer les portes d'un avenir décent dès lors qu'on ne bénéficie par d'un réseau puissant, de parents ayant eux-même réussi ou d'une fortune héritée. 
On dira qu'il y a pire, toujours. Des exemples partout, les pays en voie de développement, les usines qui ferment, la rue, le film "slumdog millonaire". Mais en définitive, le mouvement c'est la vie, et on reconnaîtra que l'espoir - il en existe d'ailleurs toujours un - se trouve nécessairement ailleurs.

Fin de semaine, donc. Mais avant cela, un autre patient reçu plus tôt dans la matinée. Son cardiologue a décidé lors de la dernière consultation de basculer son AVK  - la fluindione - par un NACO, pour "nouveaux anticoagulants oraux". Le papi est âgé, il a 81 ans, encore toute sa tête, mais pas de consentement éclairé ici. Le cardiologue lui dit : 

- Vous verrez, c'est mieux, plus besoin de faire un INR chaque mois. 

Papi fait toujours confiance aux grands manitous les docteurs, les docteurs en médecine, les vrais, parait-il, tout du moins en France. Il y aurait là beaucoup à dire sur l'éthique, l'indépendance des prescripteurs et l'information médicale qu'ils reçoivent, mais passons.

Papi, n'a pas eu de parents éduqués ou riches, alors il n'a pas fait sciences Po', il aura été embauché à l'usine Renault. Petit salaire, et donc petite retraite. Mais crise oblige, l'Etat vient d'effectuer un gel des retraites, affectant ainsi directement sa petite pension. Fais chier, parce que l'Etat qui crie famine, au lieu de taper sur les faibles, pourrait facilement en faire, des économies. Un traitement par dabigatran (Pradaxa) coûte 2 euros par jour, là où un traitement par AVK ne coûte que 0,12 euros par jour, soit un surcoût de 150 millions d'euros par an pour un produit qui ne fait pas mieux, et pour lequel on a pas d'antidote, mais c'est normal, les représentants de l'Assurance-maladie siègent au CEPS (Comité économique des produits de santé), assurant ainsi un flou qui est du "pain béni" pour les industriels, déplore François Chast dans un article du monde.fr (4). 

J'appellerai bien le cardiologue, moi, pour m'expliquer avec lui. Car, on a peur de rien, nous, la génération "Y", encore moins de l'autorité établie. Mais papi, lui, il comprendrait pas pourquoi je passe ce coup de fil, alors même que ce serait peut-être pour son bien, et ma chef, elle, doit absolument faire son chiffre journalier. Je passe donc encore sous silence ce que je sais.
Ma chef ? Elle a pas d'éthique, je parierai même qu'elle a bien dormi quand les mecs sous Médiator sont morts. D'ailleurs, je me demande même si y a un pharmacien en France qui en aura fait une, d'insomnie, suite à cette histoire. 

Pourtant, les pharmaciens sont les gardiens des poisons, non ? En tout cas, c'est écrit sur le serment de Galien, un truc qu'on lit au moment de la soutenance, mais rarement mis en pratique dans la réalité. En pratique, poison ou pas, si le médicament a une AMM, et qu'il est prescrit, sauf contre-indication, 99,9% des fois, papi recevra effectivement les médicaments, et le pharmacien ne fera que suivre les ordres du prescripteur. 

Ma chef un peu plus tard, m'apprendra qu'elle venait de s'acheter une voiture, une belle Clio toute neuve, toutes options, d'ailleurs dans la même usine où papi avait travaillé. Elle aura aussi investi dans un studio parisien qu'elle louera très cher. "Dominants- dominés", disais-je, me jetant ainsi à la figure le succès d'une génération "baby-boom" qui aura tout eu.

Alors ce papi, à qui je souriais nerveusement, j'avais envie de lui dire bonne chance. Il avait survécu à la fluindione, peut-être allait-il survivre aussi, au dabigatran. En tout cas je croisais les doigts. Quant à moi, ascenseur en panne, obligé de me taper les ricanement des dealers chaque nuit, espérant ne pas tuer un "vieux", trop intoxiqué par un médicament mal noté ; j'attends les week-ends en serrant les dents.

Je ne suis pas aigri, bien au contraire. Je ris, souris, lançant mes dernières forces dans une bataille sans nom. Aimer, c'est "se réjouir de", disait Spinoza, alors je me réjouis de mes amis, de ma famille, et d'un certaine lucidité qui me maintient en vie.
Et puis un de ces quatre, quand les conditions seront enfin réunies, espérant trouver un endroit un peu moins inégalitaire et où les chances de réussites reposeront un peu moins sur la fortune héritée, et les origines sociales, mais sur la personnalité et les capacités individuelles intrinsèques ; je laisserai alors derrière moi, ce post-it : 

- Sorry, i had to go see about the world...  (5)





Bibliographie  : 

1. Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe 1, 285-286

2. Eric le Boucher. Le scandale de la génération X. Les échos. 2010

3. Nicolas Jounin. Il est temps d'en finir avec Science Po ! Lemonde.fr. 2012

4.Florence Rosier. Pourquoi un prix aussi élevé ? Lemonde.fr 2013


5.Gus Van SanT. The good will hunting, dernière scène.1997 



The good will hunting, Gus Van Sant, 1997

mercredi 17 juillet 2013

J-362 : la thèse, Into The Wild et Cymbalta

Après la thèse, je me suis pris des vacances, ça valait bien ça. Entreprise fatigante, stressante, exténuante. On y laisse des plumes, forcément.
Pour accéder à ce graal, on lève la patte comme un caniche. Oui, oui, comme un caniche.
En fin de cursus, on commence à y penser sérieusement, on se dit qu'on a encore le temps. On procrastine. 
Puis on met le doigt dans l'engrenage et on commence l'ascension de l'Everest. Pour cela, il faut au préalable valider le choix du sujet, le directeur de thèse, ainsi que le responsable de thèse. Passons les étapes de l'ascension, et le bonheur une fois le sommet atteint. Attardons nous un peu sur les imposteurs et les fraudeurs. 
Si l'ascension est une étape personnelle, un cheminement, presque une expérience métaphysique ; on peut nuancer l'exploit tant la supercherie est flagrante.
Les sujets de thèse sont parfois tellement ridicules qu'on se demande comment un directeur aura pu se porter garant. Certains effectuent l'ascension en 5 ans, souvent un an, d'autres chanceux en 3 mois, trouvant une voie d'ascension magique, quasi surnaturelle. Question de copinage.

Les thèses d'exercices sont facilement accessibles. Dans les annales, prenons l'exemple de cet étudiant qui aura trouvé comme sujet : "Guide des dispositifs médicaux rencontrés à l'officine" (1). Ascension rapide, 3 mois maximum.
Applaudissons à l'inverse un bel exploit avec : "Utilisation de nouveaux outils en pharmacovigilance : à propos du retrait du médiator (benfluorex)". Ascension à l'ancienne, à 2 sherpas, sans oxygène. Durée de l'ascension : minimum 2 ans.
Ascension terminée, je pars. Je me ferrai bien un trip à la "Into the wild". Je me sens un peu mal, un peu comme le mec dans "super size me" après son indigestion de hamburgers.
C'est qu'il y a un sentiment bizarre la dedans. Sensé être heureux, et pourtant, je me sens vide, désincarné. On vient de me voler 6 ans tout de même, là ou 4 auraient suffit. Oh, effectivement, j'ai maintenant un titre. Docteur en pharmacie, la belle affaire. En réalité, on aurait pu élaguer un paquet de matières inutiles, reformer le truc en profondeur et aboutir au même résultat en 4 ans seulement.
Un peu groggy, j'ai envie de couper avec la civilisation, internet, mon ordinateur personnel, le monde professionnel, la consommation, l'immobilier. J'ai envie de vivre, enfin.
D'autres jeunes confrères m'auront fait les mêmes confidences, lucides sur leur gueule de bois post thèse. Un titre ne vaut rien quand on a l'impression de s'être fait volé son temps. Envolé, perdu à jamais ...

Mais nous sommes pragmatiques, nous, la génération "Y", nous sommes terre à terre, parait-il. Les contingences de la vie nous ramènent dans le droit chemin, et le romantisme à la sean Penn ne dure pour nous que 3 semaines, maximum. Sans illusions, de retour à la réalité, on se connecte sur WK.pharma ou OCP.fr à la recherche d'un boulot. Aucune excitation, aucune joie, aucune perspective. On connaît déjà bien le boulot, les 6 mois de stages auront déjà été un bon aperçu de ce qui nous attend. Entretien d'embauche vite expédié devant un employeur à la ramasse, à côté de ses pompes, pas vraiment à l'aise dans un échange de ce type. Contrat classique de 35h, et une période d'essais de 3 mois. Salaire de 2400 net. Belle arnaque. Évidemment 80 % des français gagnent moins que ça. Évidemment ça fait de nous des privilégiés. Encore faut-il savoir de quel point de vu on se place.

Il y a des pharmaciens titulaires heureux, je n'en doute pas. Ayant abandonné leur esprit critique, si tant est qu'ils en aient déjà eu un, au profit de la rentabilité. Aussi, je ne doute pas qu'il y ait des pharmaciens adjoints heureux. Docile durant leurs études, il resteront dociles en tant que salarié, conscient de la valeur matérielle apportée grâce au fruit de leur travail.

Mais Platon ne serait pas d'accord. Quand on sort de la caverne, c'est pour de bon. J'essaye de souffler pour ne pas craquer chaque jour. Ce salaire ? Je m'en fou, je m'en tape. Question de point de vu disais-je. Moi ce que je vois dans la balance, c'est 6 ans volé, c'est un job en l'état, qui ne nécessite que 10 % de mes ressources intellectuelles. C'est un job où je suis debout 8h par jour parce que le pharmacien titulaire n'a pas la décence de mettre des chaises. C'est un job où je dois passer sous silence mes connaissances parce qu'elles porteraient préjudices financièrement parlant, à mon "boss". 

Pourquoi devrais-je m'expatrier dans un autre pays me demandait un lecteur dans un des commentaires? 

Mettons que je continue à vivre cette vie, dans 5 ans mon dos me ferra mal, et mes jambes aussi. En même temps que mon corps s'affaiblira j'aurais aussi perdu toute capacité intellectuelle à cause d'un ennui patent. Et puis, je ferai peut-être une dépression. C'est vrai quoi, un de ces quatre, madame Trucmuche se présentera à la pharmacie suite au décès de son petit mari, et me présentera une ordonnance de duloxetine (Cymbalta®) que je délivrerai. Sauf que la duloxetine augmente le risque d'hémorragie et le risque d'hyponatrémie pouvant causer des chutes et des pertes de conscience, ce qui causera plus tard le décès accidentel de madame Trucmuche (3). Dommage, car madame Trucmuche était une mamie gâteau, attentionnée et bien entourée, un simple soutien l'aurait aidé à surmonter le deuil.
Alors dans la foulée, je ferai effectivement une dépression, car je le savais moi, tout ça. Ben oui, il n y a qu'à ouvrir la revue prescrire pour apprendre que les effets secondaires de la duloxetine sont largement défavorables à son utilisation,  du moins en pratique courante.
Mais parce que le pharmacien est payé à la marge, sur chaque boite vendue, je n'allais pas le lui dire, forcément. Et puis comme les visiteurs médicaux sont très forts, ils vont continuer à influencer les prescriptions, me forçant donc à délivrer des médicaments dont je sais très bien que la balance bénéfice-risque est défavorable, ou qu'il existe un médicament ancien, faisant aussi bien pour moins cher.
Alors, ce n'est peut-être pas mieux ailleurs, mais ça vaut la peine d'essayer. Primo, pour ma santé mentale, secondo, pour sauver mes neurones, et tertio, pour ne pas être complice de la mort de madame trucmuche et de ses apparentées.


1. Guide des dispositifs médicaux rencontrés à l'officine. Thèse d'exercice pour l'obtention du diplôme d'état de Docteur en pharmacie. Arnaud Luard. 2007.

2. Utilisation de nouveaux outils en pharmacovigilance : à propos du retrait du médiator (benfluorex). Thèse d'exercice pour l'obtention du diplôme d'état de Docteur en pharmacie. Flore Michelet. 2010.


3. Duloxétine (Cymbalta), la revue préscrire 2009 ; 29 (303) : 9









Into the wild, 2007, réalisateur :  Sean Penn






lundi 15 juillet 2013

J-363 : externat, fin de cursus, les AVK.



16 Juillet 2013
Retranscription d'un échange par SMS avec un ami tout juste diplômé et moi même : 
- PHARMA M'A TUER, disait-il dans son premier message.
- De quoi tu parles ?   
- PHARMA M'A TUER. Je suis à terre. Continuait-il dans un second message.
Fin de l'échange, j'étais au travail. Le connaissant, c'était bien évidemment à prendre au second degré quand bien même le fond du message devait avoir un sens. Je suis resté dubitatif quelques minutes pendant que j'étais au comptoir avec une patiente. Et puis, je me suis repassé le message en boucle presque toute la journée, pour finalement en comprendre la symbolique.
19h30, fin de la journée. Je saute dans le métro, et je me dépêche de prendre un calepin pour jeter quelques idées pour le billet de ce soir.
Je me suis repassé les dernières années en compressant le temps au maximum jusqu'au moment présent. Un peu comme dans un clip psychédélique, j'ai revu les 3 dernières années repasser dans ma tête en 3 min pour prendre la mesure de ce qu'on avait vécu et l'impact que ça avait  sur notre moi présent.

La 5e année pour les étudiants en pharmacie, c'est une année dite hospitalo-universitaire. Un mi-temps partagé entre une présence stricte à l'hôpital le matin et des cours classiques à l'université l'après midi. Le hic, c'est qu'on s'est tous un peu senti comme des chiens qu'on balançaient dans une navette spatiale histoire de tester les effets que cela pourrait avoir sur les organismes.
L'excitation de découvrir un univers hospitalier et ses nombreux protagonistes aura rapidement laissé la place au désenchantement le plus radical. Si l'idée de départ semble bonne, elle se heurtera rapidement au manque total de préparation et in fine, nous abandonnera à notre sort. Chaque étudiant passe ainsi le plus souvent 3 mois dans une pharmacie hospitalière (P.U.I) et le reste du temps dans des services hospitaliers.
Concrètement ?
Je me souviens le premier jour de stage, avoir été lâché en pleine "grande visite" dans le service d'endocrinologie, après une introduction rapide au chef de service par le pharmacien responsable, comme un père lâcherait son gamin à la crèche avant de filer au travail vitesse grand V.
Je me souviens du visage dubitatif des externes en médecine et des internes, devant ce nouvel arrivant arborant un badge inconnu d'externe en pharmacie. Un moment unique, un moment brutal, un moment qui marque. En tant qu'externe les tâches sont finalement assez simples et consistent à  ranger des médicaments à la P.U.I, découvrir le système de pharmacovigilance, et donc remplir quelques feuilles d'événements indésirables survenus dans les services, et liés à la prise d'un médicament, d'assister aux visites hebdomadaires, d'écouter, de beaucoup écouter, ou de  poser des questions pour les plus téméraires. Certains aventuriers c'est le cas de le dire, pourront nouer des contacts et échafauder leur sujet de thèse.

L'étrangeté de l'année hospitalo-universitaire et la violence qui en découle proviennent non pas de l'institution visité (l'hôpital et son personnel), mais de l'absence de sens et de tâches dévolues. La mise au placard intellectuelle qui est forcément subie tue à petit feu pendant un an, et ça fait mal, très mal même. Surtout quand l'environnement direct est aussi stimulant. Pour faire simple : tout le monde "s'amuse" et on reste dans une pièce seul, à côté, à regarder le mur.

Aussi n'ai-je pas trop envie de fouiller ma mémoire s'agissant des matinées passées là-bas. "Chacun sa 5HU, chacun sa merde", certains arrivaient à s'enfuir en cachette, c'était en quelque sorte l'année de tous les subterfuges. D'autres avaient un pharmacien responsable peu regardant, leur laissant le loisir de sécher des mois durant sans être inquiété. 
Alors si Dr.A.X m'a envoyé ce SMS, c'est que sa coupe devait être pleine l'espace de quelques instants.
J'imagine pour lui, un premier cycle barbant, un deuxième qui l'aura été tout autant, truffé de points inutiles, un stage hospitalier éprouvant et une thèse insensée et ce client-patient qui devait finir de le faire exploser intérieurement au comptoir.

"PHARMA M'A TUER", c'est un beau message finalement, un constat, une belle forme d'auto dérision, le courage de reconnaître qu'il venait de bouffer 6 ans de "merde", à la petite cuillère. Lorsqu'un environnement social et normatif tel que "pharma" vous persuade de la valeur et de la grandeur de votre diplôme, difficile d'aller en sens inverse ; cet ami allait pourtant plus loin quelques minutes plus tard en m'envoyant : 

 - PHARMA M'A TOUT PRIS, J'AI PLUS DE FROC...

Effectivement il n'a plus de froc, mais ai-je envie de dire, c'est le pays tout entier qui n'en a plus, au détriment des patients encore, comme bien souvent.
Résumons sans être dans la critique facile d'un système universitaire sur lequel tout le monde tire déjà.
Il suffit de suivre l'actualité. Les pharmaciens sont désormais impliqués dans le suivi des patients sous traitement par A.V.K. Ils seront rémunérés pour effectuer des entretiens pharmaceutiques, s'assurer de la bonne observance et de la compréhension du traitement par le patient. Belle initiative, sauf qu'il y a un hic. 
Un gros hic même. Mon pote me dit qu'il est mort ; façon de parler j'imagine. Il est déprimé parce que la fac lui a flingué son cerveau en le gavant de connaissances qui ne serviront pas à grand chose. Et puis il a du se mettre à quatre patte pour satisfaire les égaux surdimensionés des professeurs issus de chaque chaires universitaires, et cela aura fait de lui un docteur plutôt calé, mais calé en quoi ? A bout de souffle après sa thèse, mon pote trouve un taf et se retrouve adjoint en CDD dans une pharmacie moyenne où il se retrouve maintenant à devoir faire des entretiens sur les AVKs.
Mais comme mon pote s'est fait chié pendant ses études, il a perdu tout esprit critique. Alors devant l'ordonnance de Previscan (1), il fait le minimum. Il explique gentiment que l'INR doit être entre 2 et 3, lui explique les dangers de l'automédication dan son cas, la nécessité de ne pas oublier ses cachets, etc. Il fait son taf quoi. Sauf que mon pote est un peu largué, il sait pas que le previscan n'est utilisé qu'en France, et qu'ailleurs on lui préfère la coumadine. Normal, il a jamais lu Prescrire.
Et puis pourquoi est-ce qu'il se ferait chier à lire Prescrire ?
Avec le médiator y en a eu un paquet de morts, des milliers même, et personne n'a jamais été inquiété, pas un seul pharmacien. C'est sur, Il dormira tranquille, pas vraiment inquiété il a aura bien fait son taf.
Et puis la fac, c'est pas vraiment son taf non plus de correctement former les étudiants, de leur transmettre un esprit critique, puisque les ministres eux même s'en foutent. C'est vrai ça, la fluindione c'est le pire des AVK, mais d'un autre coté ça favorise les emplois français, alors "fuck you" la warfarine, et au diable la balance bénéfice-risque, on trouvera bien d'autres effets d'annonces pour garder la face.
Les patients ? "... pfff, on s'en fiche ils sont tellement malades ; d'ailleurs dieu lui même ne les aime pas." Dr.House

Finalement, mon pote, il a bien raison, "PHARMA L'A TUER", lui aura pris sont temps, son cerveau, sa créativité, sa perspicacité et son esprit critique. Mais mon pote n'est pas encore tout à fait mort, il est résilient, une qualité rare en pharmacie. L'avenir se trouve peut être ailleurs, en tout cas il se trouve assurément dans la revue Prescrire. Si pharma l'a tué, peut-être tuera t-il la fluindione.




                 Omar m'a tuer, 2011,  de R.Zem



1. Effets indésirables immuno-allergiques des fluindione. La revue prescrire 
   juin 2003. tome 23 numéro 240






dimanche 14 juillet 2013

J-364 : pharmacircus

Aujourd'hui, j'avais un repas de famille. Un rendez-vous dominical avec papi, mamie et les parents. Forcément, mamie m'a félicité, parce qu'à ses yeux, l'université française reste et restera toujours un véritable monument.
"Bravo" mon petit-fils m'a-t-elle dit, toute fière, le coeur rempli de joie. A ce moment-là, j'avais le choix de me taire, comme on laisse un enfant croire gentiment au père noël ou de lui balancer les coulisses du cirque dans lequel j'avais travaillé 6 ans.

Ma mamie méritait bien la vérité. 

Dans un article du journal le monde daté du 30 avril 2008 (1), on pouvait apprendre que l'endogamie du monde académique n'avait jamais été quantifiée, et que "toutes universités et discipline confondues, les candidats locaux ont dix-huit fois plus de chances que les candidats extérieurs d'obtenir un poste", et que pour certaines universités, "ce facteur pouvait atteindre 50 voire 500 soulevant ainsi la question de la qualité de l'enseignement et de la recherche universitaire".

Pour rentrer au "pharmacircus", la mission est assez simple. Ingurgiter un maximum d'informations fondamentalement pas très compliquées, et les restituer dan le bon ordre, le jour de l'audition, un peu comme font les singes savants. Dans ma promo, il devait y avoir à peu près 200 places pour 800 inscrits. Ce n'était pas l'Everest, franchement chiant, mais faisable.

Une fois intégré la troupe, l'année débutait chaque fois par le même cérémonial. Découverte des matières, analyse des emplois du temps, réflexion sur les modules qu'on allait sécher, et enregistrement des dates s'agissant des représentations, à savoir, une session en hiver et une session en été. Les plus mauvais artistes - où pas - devaient obligatoirement se re-présenter à une troisième session, courant septembre.

J'ai beaucoup souffert dans la préparation des dits "numéros". J'avais rêvé d'un espace de créativité, d'expression libre, où mon corps et mon esprit auraient pu briller, du moins être stimulé, "challengés". Nous avons eu le droit, à la place,  à tout autre chose. Pharmacircus n'a pas vraiment évolué avec son temps. C'est un établissement qu'on qualifierait de "old school". Les spectateurs qui se sont fait floués lors d'un spectacle me parlent encore d'un numéro ringard : le médiatorus.

Numéro dont je me souviens très bien lorsqu'on travaillait sous le chapiteau en 2e année. Des heures durant, l'un des professeurs endogames, cooptés, nous demandait d'apprendre par coeur comment dessiner la représentation spatiale du médiatorus : c'est ce qu'on appelle la chimie thérapeutique, l'art de reproduire et d'apprendre par coeur le nom et le dessin de toutes les molécules thérapeutiques. A la pause on enchaînait souvent sur d'autres ateliers assez différents ou d'autres professeurs nous imposaient de comprendre les machines qui pouvaient détecter le médiatorus : la chimie analytique, ou l'art de mesurer, quantifier, analyser n'importe quelle substance à l'aide d'appareils barbares. Je me souviens encore cette chaleur sous les chapiteaux, les artistes impliqués, concentrés, en lutte avec un spectrographe de masse. 
Je me souviens aussi la façon dont on moquait les artistes qui aimaient lire la revue Prescrire, au titre que cela n'avait rien avoir avec le spectacle de décembre ou juin. Ce devait donc être inintéressant, hors-sujet, inutile. 

Effectivement, c'est un cirque, une bouffonnerie, une farce. Sauf que celle-ci aura causé la mort de milliers de personnes. C'est joli d'apprendre la chimie analytique, de gaver les étudiants de matières soporifiques déconnectées des réalités, d'apprendre ce qu'est un étalon interne, de savoir calculer un test du khi-2, de comprendre la pharmacologie du médiator sur tel ou tel récepteur, d'apprendre la législation afférente à la délivrance du dit médicament.
Beau d'offrir des heures de cours à des professeurs nombrilistes, cooptés, incompétents et déconnectés des réalités du monde sensible, de bâtir une architecture hypothétique d'enseignements soi-disant coordonnés ; sauf qu'à la fin du numéro, à côté des pop-corn jonchant le sol, on retrouve aujourd'hui des cadavres atteints de valvulopathies parce qu'en autre, les pharmaciens sortant tout droit de pharmacircus auront été mal formés - ce n'est pas de leur faute -, tristement incapables de savoir que le médicament avait une toxicité avérée et que sa balance bénéfice-risque ne justifiait aucune délivrance, la faute à une formation universitaire clairement bancale.

L'université trouvera toujours grâce aux yeux des français, attachés à un système universaliste, sans discrimination, ouvert à tout bachelier et gratuit. A 200 euros l'année on peut dire que c'est gratuit, oui.
Mais c'est en réalité une belle arnaque. D'une part le peuple qui finance - qu'il le veuille ou non - ces établissements, n'en tire aucun bénéfices puisque les diplômés qui en ressortent ne sont pas capables de bloquer les délivrances de médicaments à balance bénéfice-risque nulle. D'autre part, c'est même une double peine pour les citoyens qui auront financé les études des médecins ayant prescrit le mediator et des pharmaciens qui leur auront délivré les comprimés mortels. 
Endogamie peut-on lire dans l'article du journal Le monde. Vivons caché, vivons heureux ajouterai-je. La structure universitaire elle-même, pyramidale, est au courant, et semble s'accommoder de cette vérité à peine cachée, à savoir : que personne ne va en cours sauf lorsque cela est absolument obligatoire.
Sécher les cours n'a jamais été un idéal, encore moins un absolu, c'était une nécessité.
Pourquoi écouter un tocard payé "une blinde" à balancer un vieux disque rouillé, quand tout était écrit dans les livres. Je n'étais évidemment pas le seul à sécher les cours magistraux au vu du système de retranscription industrialisé qu'avaient mis en place les étudiants pour ne pas aller en cours.

Pour faire simple, le système consistait en début d'année à recueillir le listing des étudiants volontaires, et désireux d'adhérer à ce système de prise de note. Une fois acquitté les 60 euros, chaque étudiant recevait les cours dactylographiés et imprimés, préalablement retranscrits par un étudiant ayant assisté physiquement au cours, via un système de roulement très bien organisé.

Au total, j'ai fait mes 6 ans en assistant à seulement 10 % des cours. Je me déplaçais uniquement lorsqu'il y avait un bon professeur, entité qu'on pourra finalement compter sur les doigts d'une seule main. De bons livres auront fait le reste.

Triste France, sa capacité de révolte n'est pas morte, c'est simplement l'objet qu'on regrettera. Face à une jeunesse dans la rue - pas toute, fort heureusement - contre le mariage gay, simple célébration en retard d'un droit légitime attribué à deux être humains, on regretta finalement leur incapacité à reconnaître l'imposture universitaire qui leur est  servie chaque matin et dont la majorité semble s'accommoder.
Comme on dit au cirque : show must go on.






1. Recrutement des enseignants-chercheurs : la cooptation est mise en cause. lemonde.fr, 30.04.2008

http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/04/30/la-cooptation-des-universitaires-est-mise-en-cause_1040115_3224.html

samedi 13 juillet 2013

J-365 : Le commencement : pharmérogis


 J'ai assisté il y a quelque temps à la cérémonie de remise des diplômes organisé par la faculté. Derrière la solennité du moment, il fallait surtout deviner le ridicule à peine caché.

Au départ, le discours des mecs en rouges, nippés comme des papes , assomma la moitié de l'audience. Même blasé, on se dit tout de même à ce moment là, que c'est un moment important de la vie cette foutue remise de diplôme, une sorte de libération, un peu comme recevoir son permis de conduire.
C'était surtout le sésame pour débuter les démarches d'expatriation.

Le poncif, après avoir rappelé le poids, la charge, la symbolique du moment tentait de nous rappeler la chance qu'on avait eu de traîner 6 ans durant nos carcasses dans des locaux historiques, chargés d'histoire. 
Ah bon ? Il n'avait rien d'autres de plus pertinent à dire le mec ? 
Après une heure à écouter les palabres du pape, on s'était dit dans notre for intérieur qu'on allait enfin pouvoir récupérer le précieux papier et boire une petite coupe de champagne avec les camarades de cellules. A ce moment là, moi je me sentais surtout comme dans le film "les évadés".

Certains avaient fait venir les parents, les grands parents, en costard et tout, mais franchement, pourquoi se mentir à soi-même ? 
Finir ces études, c'était surtout finir de purger une peine de "zonz" de 6 ans en milieu carcéral.

Une heure après le discours des papes, la cérémonie enchaînait sur une remise de prix spéciaux dont je ne connaissais même pas l'existence.

Un des mecs en rouge : "... elle naquit en 1985, avec une mention  très bien au bac, et une moyenne de 13,55, mlle.X a eu un parcours qu'on qualifiera de brillant. Ses deuxième et troisième année furent tout aussi brillantes avec des moyennes respectives de 14 et 13,95 ; son stage de fin d'étude effectué chez blabla lui permet aujourd'hui d'avoir une belle carte de visite. Enfin votre grand père aussi était pharmacien, bla bla...". Nous appelons donc adèle Boularre pour la remise de ce prix spécial, (applaudissement de l'amphithéâtre).

Une farce, une mascarade, un bazar ! Quelques prix spéciaux plus loin, récompensant ainsi une poignée d'étudiants sur d'obscurs critères et méprisant ainsi in fine le reste de la troupe, la cérémonie se terminait sur quelques moments insignifiants sur lesquels on ne reviendra pas ici.

Mascarade - prise d'otage - prison - mitard ?

L'année du concours, c'est une année assez pauvre et sans intérêt, comme une sorte d'année de préparation à un marathon. Chacun sa merde, chacun ses méthodes, chacun ses résultats. Il n'en ressort au final rien de très intéressant.

La deuxième année marque un tournant, un basculement en quelque sorte. Chargé d'adrénaline, euphorique, on se dit qu'on appartient à une nouvelle caste, une caste de protégés, mais la lune de miel intellectuelle ne va pourtant pas durer bien longtemps.

En septembre on se fait des potes, souvent en fonction des affinités. On commence l'année la fleur au fusil. La deuxième année, c'est une année très technique, où l'on comprend que "pharma" c'est une filière généraliste, sombre, et fourre tout. C'est là que commence le concept de prison.
Après quelques semaines à découvrir le programme, on se dit de un, que c'est très chiant, de deux que c'est extrêmement chiant, de trois, que la route va être longue. Alors on se dit, on se persuade, que peu-être tout cela va s'améliorer l'an prochain.

Généralement quand on intègre "Fleury-Mérogis", c'est qu'on a fait une connerie, non ? 
L'ironie c'est que pour intégrer "pharmérogis" on passe un concours affreux, chiant, et désespérant d'ennuis et qu'une fois dedans on semble vouloir définitivement y rester.
A "pharmérogis" c'est un petit peu différent, on devient prisonnier de soi-même. On ne quitte pas un endroit sensé nous donner un papier magique donnant accès au plein emploi, un salaire confortable et un statut social confortable. 
Face à un monde en pleine crise, n'offrant que insécurité, chômage, et absence d'opportunités, abandonner ses rêves, sa curiosité, sa vivacité intellectuelle, devant l'hôtel de l'ennui ne semble pas être un compromis si mortel à 20 ans.

Le "student bore out" ou syndrome d'épuisement intellectuel par l'ennui a fait rage dans les rangs durant ces 6 années. Chaque matin "en blanc" de travail, on faisait l'analogie du bagne, du mitard, casser des cailloux parce que le maton nous le demandait, courber l'échine, baisser la tête, ne pas faire de vague, la peur de l'administration... En somme une analogie parfaite avec le milieu carcéral.

En réalité le "student bore out" dénote surtout l'incapacité d'un système universitaire français à stimuler ses jeunes esprits et sa singulière habitude à créer un sentiment de défiance et de frustration profond chez les étudiants.
L'ennui annihile toute volonté de puissance - rappelons ici Nietzsche - chez les étudiants et assomme toute forme de rêve. C'est un peu comme une sorte de bizutage intellectuel sur 6 ans. 

La plupart des étudiants diplômés ce jour-là était heureux il me semble, un sentiment normal j'imagine pour ceux qui ont docilement embrassé le système, collaboré à une forme d'asservissement intellectuel.
Pilule bleue ou rouge, Pour nous, c'est la fin des coups de bâtons, des privations, des sévices et autres brimades intellectuelles. Ce foutu papier nous l'avons, l'occasion de rêver un peu. Car il y a une forme d'universalisme en prison, le rêve en une vie meilleur une fois sortis de là.


Prochain billet : Animosité gratuite ou véritable problème structurel de l'enseignement pharmaceutique en France ? Critiques faciles ou véritables  lacunes qualitatives de l'enseignement universitaire en France ?  





Les évadés, 1994, F.Darabont











Introduction générale


Qui suis-je ? 

Je m'appelle Dr.F, jeune docteur en pharmacie fraîchement diplômé  d'une faculté française.
J'exerce "l'art" de la pharmacie dans une petite ville quelque part en France en tant que pharmacien adjoint. 
A 30 ans somme nous mort ? Non, et aujourd'hui je décide d'ouvrir ce blog afin de vous faire partager de l'intérieur les coulisses d'un métier riche, vivant, mais en proie à de sérieux problèmes existentiels.

Mais commençons par la fin. J'ai décidé de m'expatrier, et dans un peu plus d'un an, si tout se passe bien, je ne devrai plus être là. Dès lors, j'essaierai de poster chaque jour un article, après chaque journée de boulot jusqu'à l'obtention de mon visa.

Partir n'est pas un choix, mais une impérieuse nécessité. Au programme, vous pourrez découvrir pourquoi l'industrie pharmaceutique s'apparente parfois à une entreprise de vente d'arme, pourquoi le patient qui gobe un granule de médicament homéopathique ressemble plus à un "pigeon" qu'autre chose, et pourquoi, très souvent, les vieux "un peu malade", sont souvent des "vieux" très, très cons.


J'espère que la lecture sera agréable, informative.

Citation : "Was mich nicht umbringt, macht mich stärker." (F.Nietzche)https://fr.wikipedia.org/wiki/Friedrich_Nietzsche