jeudi 26 septembre 2013

J-321 : Les syndicats, "V for Vendetta", et les angines.

Cela fait des mois que je n’ai pas peaufiné un article. J’étais pourtant sur le point de publier un texte le 26 septembre au soir, mais dans une sorte d’énervement, j’ai tout effacé, frénétiquement. Était-il vraiment raisonnable et intelligent de tirer à tout va, sur les syndicats ? Ceux-là même, n’avaient-ils pas suffisamment oeuvré par le passé pour qu’on leur soit encore, aujourd’hui reconnaissant ?

Sept mois plus tard, ma vision est encore plus radicale, tranchante, et le titre du billet reste encore d’actualité. Quant à l’affiche de cinéma, on ne pouvait trouver mieux pour illustrer mes propos.


Il est 23h38, la suite très prochainement ...


Dimanche 11 mai

Le précieux visa se fait attendre, l’attente parait interminable. Les jours se suivent et se ressemble, le temps lui-même devient une souffrance et la fin de semaine si lointaine. L’idée qu’il y a pire ailleurs n’est pas un réconfort. La médiocrité dégouline de tous les cotés. Mes amis industriels tapinent dans leurs bureaux parisiens, et subissent la même loi du marché, implacable, méprisante envers une jeunesse qui a des rêves, mais dépossédée de tous moyens pour les réaliser. Les jeunes hospitaliers souffrent eux aussi, d’une perte de sens, et d’une caste qui s’octroie tous les privilèges. L’inanité du discours des syndicats, arc-boutés sur les questions liées au mode de rémunération des pharmaciens me fait penser à une forme de « despotisme de l’esprit ». Ces représentants syndicaux ne représentent pas une profession, non. Ils ne sont qu’une forme de bouffonnerie dont le verbiage n’a pour but que la préservation de leur confortable patrimoine. L’inertie pathétique de cette classe dirigeante, à la fois politique et ordinale, me donne la nausée.

A quoi bon s’agiter, à quoi bon s’offusquer, pourquoi se révolter ? 
Les affaires se suivent et se ressemble, et Aquilino Morelle, médecin de formation, nous rappelle tristement, furieusement, que cette République n’a de sens que pour ceux qui la compose et pour seul intérêt, la médiocrité qui l’anime.

Que faire ? S’abrutir volontairement ? Anesthésier son âme ? Changer les choses ? Tout du moins, rêver le changement ? 
J’ai cru un moment donné, pouvoir bousculer un peu les choses. Et c’est tout naturellement que j’ai participé au Prix du Cespharm. Celui-ci est destiné chaque année à récompenser un pharmacien, de moins de 45 ans, qui par ses travaux ou publications a contribué à développer la prévention, l’éducation sanitaire ou l’éducation thérapeutique dans notre pays. Il est décerné chaque année par l’Ordre national des pharmaciens.
Pour la constitution du dossier, il fallait présenter des travaux pertinents et une lettre résumant les travaux. Ce que j’ai présenté (accompagné de ma thèse d'université) : 

Paris, le 3 juin 2013
Madame, Monsieur le membre du jury
Un vaccin est un médicament à part entière et le pharmacien dans la pratique de son art, est amené à informer souvent, rassurer toujours, afin que les patients s'approprient les réalités d'un risque, d'une maladie et les moyens de s'en prémunir.
La "Semaine européenne de la vaccination" ainsi que la présentation récente d'un nouveau calendrier vaccinal, nous rappellent l'existence d'une couverture vaccinale encore insuffisante en France, au regard de certaines pathologies. Les efforts des professionnels de santé pour favoriser l'acte vaccinal ne sont pourtant pas inexistants.
Face à ce constat, le pharmacien avec toutes ses compétences, ne pourrait-il pas apporter une nouvelle pierre à l'édifice, relatif au domaine de l'éducation thérapeutique auprès des populations visées par les différents programmes vaccinaux, notamment les adolescents ?
C'est à ce titre, dans le cadre d'une thèse d'exercice, que l'idée d'impliquer le pharmacien dans des établissements d'enseignement au côté de la médecine scolaire m'est apparue.
En effet, l’exemple de l'hépatite B étudié dans cette thèse montre assez bien la problématique des programmes de vaccination dans notre pays. Il est fait le constat d'une réputation entachée du vaccin (expliquant en partie la couverture vaccinale insuffisante), bien qu’un programme vaccinal faisant l’unanimité parmi les institutions reconnues en recommande l’utilisation.
Ainsi, au cours de cette thèse je me suis rendu dans un collège à la rencontre des classes de 3eme dans l'optique de sensibiliser les élèves au virus de l'hépatite B.
La présentation orale, associée à des supports pédagogiques adéquats, aura permis de présenter le virus de l'hépatite B, la chronicité éventuelle de l'infection, ses modes de contamination, l'existence d'un vaccin, le rôle des adjuvants.
Afin de mesurer l'effet de cette intervention, un questionnaire a été distribué aux élèves ayant assisté à cette présentation, ainsi qu'aux classes n'ayant pas assisté aux séances de sensibilisation.
Les résultats sont probants et absolument encourageant. Il en ressort, que les élèves sensibilisés comprennent mieux les enjeux de la vaccination, mesurent concrètement l'intérêt de se protéger, intègrent logiquement la notion de balance bénéfices-risques attachée à chaque médicament, et perçoivent in fine, la perte de chance que représente l'absence d'une prévention vaccinale pour les adolescents eux-mêmes.
Cette thèse d'exercice rappelle ainsi que le pharmacien possède un bagage technique évident à exploiter d'avantage ; laquelle - exploitation - profiterait largement à la population générale sans surcoût pour l'assurance maladie dans un contexte économique difficile où la prévention et l'éducation pour la santé sont pourtant à encourager, avec éthique et en toute indépendance.
Rappelons qu'à la fin de cette étude 91 % des élèves sensibilisés déclaraient être assez informés et/ou qu'il se feraient vacciner à nouveau si on leur laissait le choix contre 11,5 % dans le groupe témoin.
Ce travail réaffirme aussi le champ des compétences du pharmacien qui grâce à la loi HPST, a non seulement un rôle à jouer à l'officine, mais aussi dans les établissements scolaires ou l'éducation thérapeutique et la prévention prennent tout leur sens, face à de jeunes citoyens manifestement intéressés par leur santé.
Enfin, je remercie, par avance, le jury du Prix Cespharm pour la considération qu'il témoignera à l'égard de ma candidature, souhaitant au jury bonne lecture de mes travaux.


                                                                       Confraternellement
                       S.T
         Docteur en pharmacie




Le jury aura préféré Denis Cassaing et la mise en place d’un programme d’éducation thérapeutique de proximité des patients diabétiques dans le réseau officinal du département du Gers. (3)
Saluer la mise en place d’un réseau pour diabétiques c’est une chose, mais ne pas faire échos de travaux qui permettraient clairement d’éduquer et de sensibiliser toute une classe d’âge avec les bénéfices qu’on pourrait en tirer, ça en est une autre, et cela en dit long.
Rappelons au Cespharm, à l’Ordre des pharmaciens, au ministre de la santé, que la crise de confiance qui touche les vaccins s’installe durablement et que la résurgence de maladies potentiellement graves et pourtant évitables n’est malheureusement plus un fantasme, mais bien une réalité. (4,5,6)

Si le film "V for Vendetta" est une allégorie stylisée, prônant la lutte armée comme dernier recours face à un appareil d’Etat verrouillé, amenant finalement le peuple à se révolter, personne n’imagine cette issue possible dans le monde réel. Les esprits libres, et révoltés semblent bien trop dispersés, esseulés pour pouvoir changer l'ordre établi. La réponse se trouve finalement, peut-être, dans cet article, avec comme conclusion cinglante, et brillante : 
«A new study partly-sponsored by Nasa's Goddard Space Flight Center has highlighted the prospect that global industrial civilisation could collapse in coming decades due to unsustainable resource exploitation and increasingly unequal wealth distribution. » (7)
Ainsi, le parlement n’en viendrait pas à s’écrouler par le souffle horrible d’une bombe, l’ironie sera peut-être l’effondrement de toute forme de civilisation moderne, dicté par l’aveuglement et la cupidité de quelques individus qui se seront arrogés les possibilités d’un quelconque changement. L’essentiel serait alors à mes yeux ceci : vivre avant qu’il ne soit trop tard.

«All you need is love.»
 Paul McCartney/John Lennon

  1. http://www.cespharm.fr/fr/Prevention-sante/Actualites/2013/Denis-Cassaing-laureat-du-prix-du-Cespharm-2013
  2. https://www.mutualite.fr/L-actualite/Kiosque/Revues-de-presse/Semaine-europeenne-de-la-vaccination-retrouver-la-confiance
  3. http://www.lemonde.fr/sante/article/2014/04/02/vingt-cinq-nouvelles-plaintes-bientot-deposees-contre-le-gardasil_4394385_1651302.html
  4. http://tempsreel.nouvelobs.com/l-enquete-de-l-obs/20140404.OBS2688/exclusif-cancer-du-col-de-l-uterus-pourquoi-le-vaccin-gardasil-fait-peur.html
  5. http://www.theguardian.com/environment/earth-insight/2014/mar/14/nasa-civilisation-irreversible-collapse-study-scientists



"V for Vendetta" de James McTeigue, 2005

lundi 16 septembre 2013

J-322 : "Gattaca", "The Great Dictator", et la dépression existentielle.

"Il n'y a pas de gène pour l'esprit humain". Ainsi se termine la bande annonce du film "GATTACA". Autant la génétique porte en elle d'immenses espoirs thérapeutiques, autant le XXIe siècle nous aura appris l'importance du milieu dans lequel nous évoluons.
L'idée effrayante d'un déterminisme génétique tout puissant, dictant notre devenir, et nos potentialités reste encore fantasmé. En revanche, les distinctions sociales fondées sur la fortune, en particulier la fortune héritée, sont elles, bien ancrées dans la réalité.
Je me souviens en troisième année d'un pote de fac', appelons-le antoine,  qui avait fini par m'avouer avoir hérité d'un million d'euros. Bien évidemment, il ne le criait pas sur les toits. Mais, il avait la lucidité des gens riches, la sensation qu'il serait à l'abri, pour toujours. Le type n'était pas un génie, et avait pourtant réussi à passer le concours de première année. Son rêve, était de devenir titulaire d'une pharmacie d'officine et de faire beaucoup, beaucoup d'argent, ayant compris la sécurité et les rendements corrects d'une niche commerciale bienveillante. Antoine représentait l'archétype de l'étudiant égocentrique, avide, et vide de toute substance, si ce n'est l'appât du gain. Il n'avait pas choisi ce commerce par hasard. Il lui aurait été bien plus facile d'ouvrir un commerce de fringues, ou un restaurant. Non, il avait choisi un commerce qui flatterait, à la foi son ego, et maintiendrait le rang social de sa famille.

Les concours de première année des filières médicales dans leur configuration actuelle, si ils prétendent donner leur chance à chaque étudiant, justifiant ainsi la méritocratie républicaine, représentent en réalité, la quintessence d'un système profondément inégalitaire, fondé sur un ensemble de connaissances académiques normatifs, arbitraires et pré-établis. Les étudiants provenant de milieux modestes, ayant fréquenté des lycées moyens, n'ont aucune chance face à d'autres étudiants issus de classes aisées ayant fréquenté des lycées d'excellence. Et, lorsque la rentrée universitaire a sonné, ces étudiants fortunés ayant non seulement bénéficié d'un enseignement secondaire "dopé", auront en plus droit à des prépas' privées, au prix exorbitant, dont les enseignants ne sont rien d'autres que d'anciens professeurs ou d'anciens étudiants ayant une connaissance parfaite des normes exigées.

A l'inégalité du capital économique vient dont se surajouter ce que Pierre Bourdieu appelait, le capital culturel. Antoine et les autres bien-nés ont réussi un braquage parfait, enfin presque. Car, le capital culturel s'acquiert au prix d'un certain nombre de sacrifices, somme toute très relatif. Il faut bûcher, lire, apprendre, étudier, passer des examens jusqu'à l'obtention du diplôme universitaire. Et c'est exactement l'argument fallacieux des élites qui admettront qu'ils ont mérité tout ce qu'ils ont.

Le cas d'antoine n'est pas rare. Thomas Piketty, économiste rappelle dans son dernier livre, Le Capital au XXI siècle, que 10 % des Français héritent de plus ou moins 1 million d'euros. Plus effroyable encore, 10 % des Français détiennent entre 60 % et 65 % du patrimoine hexagonal et 50 % ne possèdent strictement aucun capital. A Sciences-Po, le revenu moyen des parents d'élèves correspond à 10 % des familles française les plus aisées (1).
Alors dans ce contexte, la méritocratie républicaine est toute relative et bien méprisable. 

Depuis mon dernier billet, rien n'a changé ou presque. L'été se termine et en ce début de rentrée, je vomis chaque instant qui passe. Mon patrimoine ridicule, ne me permettrait pas d'acheter ne serait-ce qu'un 30 m carré, alors que dans le même temps, ma chef en est à son quatrième investissement locatif. Mon isolement intellectuel est total. Je ne respire que lorsqu'il m'est donné l'occasion de parler à mes amis. Les lenteurs et le pathos de la France me désespèrent. L'automne approche et la prescription d'antibiotiques tout azimut repart à la hausse. Comme à l'accoutumée, les patients me rapportent des boites neuves de médicament que je jette directement à la poubelle. Le gâchis est total. Le gouvernement enchaîne les nouveaux prélèvements, prétextant combler les déficits, mais dans le même temps il autorise des dépenses de santé exorbitantes, autorisant les prescriptions de traitements coûteux et sans intérêts, toujours au profit de l'industrie pharmaceutique.
Les médias recyclent en boucle les sujets Syriens, et s'accrochent à l'éventualité d'une intervention militaire. Le sensationnalisme d'une pseudo élite mondiale accapare tout l'espace médiatique quand le reste de l'humanité souffre. Pourquoi la France ou même les USA auraient-ils quoi que ce soit à dire sur le sort d'une nation alors même qu'ils pourraient sauver des millions de vie en autorisant l'utilisation de molécules brevetés s'agissant des trithérapies utilisées pour traiter le VIH, et qu'ils ne le font pas ? Drôle de moralistes.

Par curiosité, je lis la publication du World Hapiness Report, publié par l'ONU. La France se classe 25ème, la suisse, elle, est classée 3ème, peut-être devrai-je étudier ce pays (2).
Il me manque encore quelques papiers avant de finaliser mon dossier. Je vis l'immigration sélective de plein fouet. Difficile d'attendre des autres et de subir une telle sélection. Tout va trop lentement et cela pèse, forcément.
Ma chef me casse toujours autant les "couilles". Chaque matin, chaque seconde, chaque minute. Je suis pourtant rigoureux, mais la folie des petits patrons est tout simplement sidérante, déconnectée de toute mesure et de tout tact. Sans véritable contre pouvoir, le petit patron fini tout simplement par perdre pieds, avec le temps. C'est ce que je qualifierai de syndrome du "dictateur". Le "maquereau" ou la "maquerelle" n'a de cesse, que l'analyse journalière de son chiffre d'affaire. Les employés ne sont que des agents économiques, qu'il faut sans cesse surveiller. Je la méprise, son niveau intellectuel est à chier, des lors, à quoi bon la mettre au courant de l'actualité scientifique.
Dans mes derniers post' j'avais parlé de l'inutilité et de la dangerosité de la bromocriptine, prescrit pour arrêter des montées de lait, chez les femmes, après l'accouchement. Il y a deux semaines, l'EMA émettait enfin un avis défavorable à l'utilisation de ce médicament, avec 10 ans de retard.
Mais ça, elle s'en fout, ce qui lui fait mal, c'est la baisse objective de son chiffre d'affaire.

Le salut ne peut venir d'un monde politique en ruine. Un bijoutier tue un bandit, et c'est la nation qui s'enflamme, alors qu'une violence quotidienne, plus sournoise, moins manifeste, ne cesse de renforcer les extrêmes.
Les personnalités politiques s'agitent, aboient, gesticulent, dans un ultime effort afin de capter les voix, qui sauraient perpétuer leur domination et le faste d'un quotidien doré, au milieu des palais républicains. Comment ne pas mépriser un pays, un siècle, une époque, lorsqu'une fille comme Marion Marechal le Pen accède au statut de député.
The great dictator,1940. de Charles Chaplin.

Thomas Picketty propose un impôt progressif sur le capital, complémentaire de l'impôt progressif sur le revenu. L'idée est bonne dans l'absolu, encore faut-il que l'ensemble des nations opte pour cette solution. On imagine difficilement un gouvernement avoir le courage politique d'instaurer pareille taxe. Ainsi, nécessairement, les inégalités vont se creuser jusqu'à un point de non retour. 
Combattre les inégalités et les subir le moins possible deviennent donc les vrais objectifs de guerre, avec pour corollaire, la volonté de survivre et de trouver un sens à sa vie.
Citons Carl von Clausewitz pour qui, "la victoire revient à celui qui tient le dernier quart d'heure." Je tiendrai bon à ce poste le temps que les papiers se fassent, je ne craquerai pas même si chaque seconde m'anéantit un peu plus. "En aucun cas, la guerre n'est un but par elle-même. On ne se bat jamais, paradoxalement, que pour engendrer la paix, une certaine forme de paix." Il est vrai cette guerre avec le petit patronat me tue, m'écœure, me marque au plus profond de moi, mais je me réjouis à l'idée qu'après cela, j'atteindrais enfin l'ataraxie. Du moins pour quelque temps.






Bibliographie :

Olivier Pascal-mousselard. Comment combattre les inégalités ? Les réponses de l'économiste Thomas Pikkety. Télérama N° 3320. Le 31.08.13

lien : http://www.telerama.fr/idees/comment-combattre-les-inegalites-les-reponses-de-l-economiste-thomas-piketty,101515.php



John helliwell, Richard Layard, Jeffreyx Sachs. World hapiness report 2013.



"Gattaca", d'andrew Niccol, 1997.